« Je marche » sur les ailes du vent, 
je cours toujours après le temps. 
Mes chaussures se sont arrêtées,  
elles ont décidé de flirter. 
Un peintre les a regardées, 
en grève, elles étaient épuisées… 
Je marcherais désormais doucement 
sentant l’épousaille de mes chaussants 
ceux qui me suivent vaille que vaille 
alliant couleurs de jupe et chandail. 
Le cuir a tant et tant partagé 
de mes avancées de mes reculés. 
Ils ont perdu la tête à me voir 
marcher sans voir et sans savoir. 
Chaussures des villes, chaussures des champs, 
celles-ci ont perdu leur amant. 
Elles s’attristent au bord du chemin 
rêvant qu’on leur tende la main. 
Usées elles ont tant rabâché 
qu’ell’ n’ voulaient plus se déplacer. 
Oui, mais ce sont les seules que j’ais.
Et, va nu pied ça ne se fait. 
J’aurais pu les utiliser  
en sautillant à cloche-pied. 
Ainsi j’en aurais usé qu’une 
mais comprenez mon infortune. 
Les lacets trainent dans les flaques 
l’horloge du bourgeois fait tic-tac. 
J’aimerais pouvoir regarder… 
On n’laisse pas rentrer les crottés. 
Mes lacets ont vécu la guerre, 
guerre de la faim et guerre des nerfs. 
Si je suis autant évasé 
c’est que je n’peux me séparer 
de mon sympathique mendiant 
qui s’en va dormir dans les champs. 
Ma couleur est marron ou noire 
selon l’éclairage du soir. 
J’encaisse tous les déboires 
de mon ami si souvent noir. 
Je suis perfusé en fin d’vie 
exténué au pied du lit. 
Adieu, je vais m’en aller 
rejoindre les godillots percés. 
 
Blandine